Petit déjeuner au bord de la mer

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Alors que Simon finissait de mastiquer son morceau de poisson, Yahshua tourna son regard vif dans sa direction, et avec un sourire lui posa cette question qui résumait tout :
    “Simon, fils de Yonah, m’aimes-tu plus que tout çà ?” Il fit un léger signe de tête en direction du rivage, des filets, du bateau et de la mer.
Simon se tortilla, mal à l’aise. Quelque chose l’étreignait et la douleur semblait s’étendre dans tout son être, comme quand une abeille vous pique. C’était comme si quelqu’un lui avait fait avaler une poignée de sable. Essayant de s’éclaircir la gorge, il bégaya : “Ou-ui, euh… tu sais que je suis ton ami !”, refoulant la brûlure qui le prenait à la gorge comme une fièvre.
A peine s’il entendait les paroles qui s’adressaient directement à son cœur, lui Simon le Roc, pendant que le Maître continuait à parler :
    “Nourris mes brebis…”
Les larmes lui montèrent aux yeux, puis leur dernière expédition de pêche revint à sa mémoire : le vent sifflait dans les voilures, alors qu’ils louvoyaient au sud du rivage à la recherche de poisson, le flamboiement du soleil couchant sur son dos en sueur et l’odeur de la brume dans le vent du soir… Que pouvait-il répondre ? Il savait pertinemment ce que tout cela signifiait et à quoi il était appelé à renoncer, une fois pour toutes !
“Mais Simon, m’aimes-tu ?” Toujours aussi calme, la question le frappa néanmoins de plein fouet. Simon en remarqua le ton insistant et savait exactement ce que Yahshua demandait. La vue de la croix s’imposa à l’imagination de Simon. Il se vit dans la peau du Maître, la chair à vif de son dos, supportant une poutre de bois grossier jusqu’à cet endroit… (Simon frémit) le Golgotha, pour y être martelé et cloué à cette chose… Il savait ce qui lui était demandé, il savait qu’il était  appelé à donner sa vie, aimer sans limite, tout risquer, tout abandonner… sa pêche, ses filets, son bateau, sa vie… Ses yeux embrumés firent le tour du cercle d’amis. Il les avait lui-même initiés au bateau… “Pourquoi moi ?” pensa-t-il. Jean le dévisageait avec des yeux pleins de bonté ; il semblait comprendre ce que Simon traversait, alors que les autres restaient assis et silencieux, certains regardant Yahshua, d’autres fixant le sable.
“Tu sais que je suis ton ami !” insista-t-il faiblement, ne sachant trop quoi dire ou comment justifier sa honte et sa confusion. Il ne pouvait s’empêcher de revoir les choses qu’il ne voulait pas se rappeler. Cette nuit sombre et fraîche autour du feu, le regard de la fille du serviteur et la peur irrésistible qui remplit son âme lorsqu’elle lui posa cette même question.
“Nourris mes brebis” vint la réponse. Yahshua s’était, entre temps, rapproché de Simon et lui avait posé sa main sur l’épaule. Il prit Simon par la barbe et lui releva doucement la tête afin de le regarder dans les yeux. Simon résista un peu, mais sentit cette pression ferme le redresser. Un gentil sourire éclairait le visage du Maître.
“Simon, es-tu vraiment mon ami ?” demanda t-il cette fois. Simon ne pouvait plus retenir ses larmes qui coulaient librement maintenant. Il lâcha sa réponse comme un appel final à la miséricorde.
“Maître, tu sais tout ! Tu sais combien je t’aime.” C’était fini. Quand Yahshua le lâcha, Simon se couvrit le visage de ses mains et pleura sans retenue.
“Nourris mes brebis” vint le commandement final.
Yahshua se leva, marcha vers le feu et le ranima avec un morceau de bois ; puis se retournant vers Simon, il dit :
“En vérité, Simon, quand tu étais plus jeune, tu avais l’habitude de t’habiller et d’aller là où tu voulais. Mais un jour viendra où tu tendras les mains et quelqu’un d’autre viendra t’habiller et te conduira là où tu ne voudras pas aller…”
Simon était d’accord. Il leva la tête et regarda droit dans ces yeux aimants et pourtant pénétrants. Il n’éprouvait plus ni honte, ni résistance, il n’avait plus rien à cacher.
Il ne voyait rien d’autre que l’amour que son Maître avait pour lui et il désirait aimer ses frères de la même manière.

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